Le devenir architectural du Paris historique, c’est-à-dire la part urbaine située à l’intérieur du boulevard périphérique, suscite depuis quelques années de nouvelles controverses. La possibilité de rebâtir – et donc de détruire massivement – des édifices anciens au sein même d’une limite intra-muros qui n’a pas été étendue depuis 1860 représente un des principaux enjeux des futurs “Grand Paris” proposés pour une capitale qui souhaiterait rester internationale. Ces tergiversations urbanistiques invitent à reconsidérer la formation historique du visage architectural d’un bâti parisien surtout marqué par le XIXe siècle. Il faut en effet attendre les révolutions politiques et industrielles de ce siècle-là pour voir Paris se transformer en capitale européenne, héritière d’une centralité administrative devenue proverbiale.
La croissance du tissu urbain parisien repose sur trois grandes pulsations chronologiques : le XIIIe siècle, le XVIIe siècle et le XIXe siècle. La Lutèce antique n’était qu’un relais, un pont routier pour traverser la Seine du Nord au Sud.
Longtemps restée à l’écart des grands axes européens, la ville des Parisii reste une capitale régionale jusqu’au XIe siècle, cantonnée dans son îlot central. La rive droite, dont une bonne partie est constituée par un ancien bras mort de la Seine, est difficile à aménager. Seule alors, la rive gauche offre un point d’appui et la future montagne Sainte-Geneviève est le capitole de la cité romaine, avant d’être christianisée et investie par les monastères : Saint-Germain-des-Près, Saint-Victor et Sainte-Geneviève, fondée par Clovis au début du VIe siècle.
La prise de contrôle de la Normandie par Philippe Auguste au début du XIIIe siècle redonne à la Seine une fonction principale et à la ville, qui prend alors définitivement son nom, une situation centrale au sein d’un grand bassin fluvial, qui s’étend de la Champagne à l’Anjou et de la Flandre au Berry. Après une phase de stagnation assez longue, marquée par l’éloignement du pouvoir royal dans le bassin de la Loire aux XVe et XVIe siècle, la capitale renoue avec la commande architecturale et le développement du bâti sous le règne d’Henri IV, constructeur des premières grandes places royales (Dauphine, Vosges) qui s’affirment comme les nouveaux éléments de structuration de la ville. La destruction par Louis XIV des murailles médiévales ouvre la voie à un développement continu du tissu urbain et de la population qui ne dépasse pas le million d’habitants avant la seconde moitié du XIXe siècle. Le réaménagement global réalisé par le préfet Haussmann accompagne autant qu’il provoque une rupture majeure dans l’histoire de la construction de la ville.