Paris ne s’est pas faite en un jour ! Du Moyen-Age au Grand Paris, au gré des rois, empereurs, présidents… la capitale s’est façonnée pour acquérir cette forme urbaine spécifique avec ses avantages et ses inconvénients. A l’heure ou l’actualité nous proposer de découvrir le Paris de demain, il est important de se questionner sur les différentes évolutions urbaines de Paris. Au cours des XXème et XXIème siècles, Paris n’a eu de cesse de se réinventer et pourtant, entre La Renaissance, les travaux d’Haussmann, les Modernes et aujourd’hui que reste-t-il de ces opérations qui ont radicalement repensé notre capitale ? En effet, contrairement à une idée reçue, Paris se réinvente ambitieusement régulièrement, et ce depuis Philippe Auguste. Sans remonter jusqu’au Moyen-Age les projets d’envergure pour la ville sont nombreux, et chacun porte un projet, un vocabulaire affichant ses ambitions clairement et laissant un héritage visible sur la ville d’aujourd’hui.
Des étapes clés marquent ce développement singulier, à commencer par la période des « Grands Travaux ». Entre le XVème et le XVIIème siècle, le désir d’embellissement de la ville devient omniprésent dans les actions de renouvellement urbain entreprises par les rois successifs (François Ier, Henri IV, Louis XIV). La ville devient un instrument de rayonnement du pouvoir royal et ces importants changements architecturaux vont marquer durablement le paysage urbain parisien. Henri IV entreprend une politique de « Grands Travaux » sans précédents qui contribue à gommer le passé médiéval de Paris pour lui donner l’allure d’une capitale royale : nouveaux styles architecturaux inspirés de la Renaissance italienne, places royales, innovations techniques (pompe de la Samaritaine,1609) et règlementation d’alignement.
Au XIXème siècle, Haussmann va continuer le travail de transformation entrepris par Rambuteau au début du siècle, à une échelle sans précédent avec une part importante de réaménagement de grandes avenues et de construction de perspectives bourgeoises avec immeubles de rapport. Ce sont les « Grandes Percées » soit 137 kilomètres de rues réaménagés dans une ville « habitée ». Ces interventions d’envergure mêlant nouvel esthétisme et désir de globalisation ne se sont pas arrêtées avec Haussmann et sont aujourd’hui à l’unisson d’architectures plus contemporaines telles que l’ensemble Louvre-Pyramide.
Les années 1950 et 1960 avec « l’urbanisme de dalle » influencé par les théories de Le Corbusier mais aussi les grandes utopies d’une vision d’un Paris « du futur », moderne et confortable pour tous, laissant place à une imagination presque sans limites. « C’était la grande aventure » disait Michel Holley concepteur notamment du secteur Italie XIII et du premier dessin du Front de Seine dans le XVème arrondissement.
C’est à cette période que la ville va laisser place au “Tout automobile” et se transformer autour de grandes infrastructures comme le périphérique qui à la manière de la dernière enceinte de Thiers va venir figer la forme de la Paris.
C’est par exemple en 1958 que l’Etat décide d’aménager un quartier d’affaires futuriste sur dalle. À cette date, le site de La Défense est occupé par des pavillons vétustes, de petites usines, des bidonvilles et quelques fermes. Aujourd’hui le quartier compte plus de 2 500 entreprises, 20 000 habitants répartis dans 71 tours et une soixantaine de sculptures d’art contemporain. Cet exemple met en lumière les principes de modernité développés par la Charte d’Athènes (séparation de la circulation piétons – automobiles), l’originalité des multiples tours et les problématiques liées à son positionnement stratégique dans le Grand Paris.
Il y eut également le Président François Mitterrand et ses Grands Travaux à dimension sociale, économique et culturelles, le Grand Louvre, la Défense, Bercy, les grands parcs de La Villette, André Citroën…, et le lancement des grandes ZAC dans les années 1980 -1990, Bercy, Gare de Lyon, Paris Rive Gauche. Et enfin, plus proche de nous, Aménager Paris en 2000 et Réinventer Paris aujourd’hui.
Identifier ces étapes c’est apporter un éclairage sur notre environnement urbain quotidien (travaux de rénovation de bâtiments, politique de rénovation de l’espace publique, piétonisation des berges…) mais explique aussi la stratégie adoptée par les décideurs pour continuer à faire évoluer Paris et conserver son dynamisme et son attractivité tout en respectant son patrimoine.
Réinvestir les enclaves, reconquérir les friches, faire du périphérique une zone de transition douce en réhabilitant, transformant, construisant des nouveaux modèles de quartiers “contemporains”… cette terminologie fait désormais partie du vocabulaire associé au discours expliquant les angles d’évolution de Paris et sont des “solutions” au problème de densification de cette entité close, condamnée par les choix successifs de son histoire à se renouveler sur elle-même, ou pas ?
Christine Hoarau-Beauval, 2016