François Truffaut (6 février 1932 à Paris – 21 octobre 1984 à Neuilly) est certainement un des cinéastes français les plus connus du XXe siècle. Son œuvre est associée au courant avant-gardiste de la “Nouvelle Vague”, tout en bénéficiant d’une reconnaissance populaire croissante. En ce sens, il est une des figures tutélaires d’un cinéma français à la fois indépendant sur le plan artistique et autonome sur le plan financier. Réalisateur prolifique, il met en scène 21 longs métrages en 25 ans, entre 1959 et 1984. Passé à la réalisation après avoir été fervent critique de cinéma, il fut scénariste, mais aussi producteur (Les Films du Carrosse) et enfin volontiers acteur, dans ses propres films ou ceux des autres (Steven Spielberg, Rencontres du troisième type, 1977). Sa renommée internationale est consacrée par l’obtention d’un oscar en 1973 pour La nuit américaine.
La biographie de François Truffaut pèse étroitement sur la nature et la forme de son oeuvre cinématographique. Ainsi les thèmes abordés dans ses films suivent le fil de sa vie et s’y entremêlent sans limites. En 1959, il tire de son expérience d’enfant illégitime, reconnu par un homme qui n’est pas son père, une œuvre manifeste, Les 400 coups, qui fut d’emblée reconnut à Cannes comme un chef d’oeuvre (Prix de la meilleure mise en scène en 1959). Il y montre l’enfance contrariée et l’adolescence réprimée d’Antoine Doinel, double avoué de lui-même, et incarné à l’écran par Jean-Pierre Léaud qui sera longtemps son acteur fétiche. Scénariste du A bout de souffle de Jean-Luc Goddard, il est aussi la figure de proue de la Nouvelle Vague. Les “aventures d’Antoine Doinel”, qu’il va suivre du mariage jusqu’au divorce, vont le poursuivre durant vingt ans : après Baisers volés (1967) et Domicile conjugal (1968) il clôt avec L’amour en fuite (1979) un cycle initiatique qui suit une sorte de fibre romanesque très inspirée par Balzac.
Tout en consacrant aux jeux de l’amour et du hasard, entre marivaudage et romantisme, entre adultère et vie en couple(s), une part essentiel de ses films (Jules et Jim, La Peau douce, Les deux anglaises et le continent, L’homme qui aimait les femmes, La femme d’à côté), il ne dédaigne pas le genre du polar (Tirez sur le pianiste, La mariée était en noir, La sirène du Mississipi, Vivement dimanche !). La Nuit américaine (1973) et Le Dernier métro (1980), consacré par les récompenses et le public, offrent aussi deux mises en abyme de la création cinématographique et théâtral. Il meurt en pleine activité, d’une tumeur cancéreuse au cerveau en 1984.
Entre œuvres populaires et “d’auteur”, les films de Truffaut sont toujours arc-boutés sur un récit plus ou moins dramatique. Tout d’abord il est vrai qu’il a exploré de très nombreux genres, depuis la Science-fiction (Fahrenheit 451) jusqu’à la comédie (Une belle fille comme moi). Il puise volontiers la matière de ses scénarii dans des adaptations littéraires libres, d’écrivains pas forcément très connus, comme Henri-Pierre Roché (Jules et Jim).
En fait Truffaut a été obsédé par la question du rapport de complémentarité entre le cinéma et la vie, entre le rêve et la réalité. Cette question envahissante est proposée à ses spectateurs comme une réflexion partagée. Truffaut cherche toujours à mettre en rêve la vie en mettant du réel dans le cinéma. Il reste donc toujours “réaliste”, au sens où ses personnages sont dotés d’un puissant pouvoir d’identification. Toujours pris dans “le tourbillon de la vie”, porté en chanson-manifeste dans Jules et Jim, hors de toute réduction sociologique et psychologiques, les “caractères” de Truffaut sont des individus à la fois inquiets et heureux, qui tendent à un très large public un miroir fidèle de la crudité des passions et des joies immédiates de la vie.
Truffaut vouait une admiration sans limite à Jean Renoir dont il dira qu’il est le plus grand cinéaste du monde. Il rendait hommage à ses pairs en pratiquant leur cinéma. Ainsi, dès Les 400 coups, il a recours à une présence hitchcockienne en apparaissant en personne dans la séquence de la fête foraine. Il reprendra d’ailleurs dans l’ouvrage qu’il consacre à Hitchcock la citation de Cocteau à propos de Camus : “Son oeuvre continuait à vivre comme les montres au poignet des soldats morts”. Dans le même ordre d’idée, dans Domicile conjugal, il met en scène une courte saynète où Antoine Doinel, son personnage, croise M. Hulot, le personnage inventé par Jacques Tati.